« Notre régime alimentaire est principalement composé de produits de la mer. C’est naturel pour nous de pêcher ces produits, nous l’avons fait toute notre vie. Cette nourriture est saine, croyez-moi. La pêche fait partie de ma culture et de celle de mes ancêtres, et ce depuis des milliers d’années. Je ne fais que perpétuer une tradition que je ne veux pas voir disparaître » – Kevin Mason, aîné du peuple yuin et pêcheur

Kevin Mason est un homme svelte et sportif. Cet arrière-grand-père de 71 ans attribue son bon état de santé à son régime composé de produits de la mer et à son activité physique — la pêche — qu’il pratique pour nourrir sa famille et sa communauté depuis aussi loin que ses souvenirs remontent. Il est membre du peuple yuin, un peuple marin qui survit grâce à la mer.

Mais la perpétuation de cette ancienne tradition culturelle peut amener les Australiens autochtones à avoir des démêlés avec la justice. En réponse aux pressions exercées par le secteur industriel, les peuples aborigènes d’Australie sont harcelés, poursuivis et condamnés à des amendes pour leurs activités de pêche. Kevin a été espionné, agressé et emprisonné par des agents de pêche du gouvernement. En 2018, il faisait face à une longue peine de prison pour avoir capturé une petite quantité d’ormeaux, mais le gouvernement a suspendu l’affaire au dernier moment.

« Je savais que, selon la tradition, j’avais le droit de faire ce que je faisais, explique-t-il, le droit de chasser pour nourrir mon peuple. Au fil des ans, on m’a tout simplement pourchassé, comme un citoyen de seconde zone. On m’a soumis à beaucoup de pression, on m’a persécuté pour quelque chose qui, selon la tradition, me revenait de droit ! »

En réprimant la pêche culturelle, le gouvernement de la Nouvelle-Galles-du-Sud ignore la recommandation de la Commission de productivité du gouvernement fédéral[1], la loi de 1993 relative aux titres autochtones et deux arrêts récents de la Haute Cour[2]. En 2015, un rapport officiel des autorités de la Nouvelle-Galles-du-Sud a conclu que les quantités pêchées par les Aborigènes étaient bien en deçà des seuils autorisés par la loi, et que les pratiques autochtones étaient plus adaptées pour assurer la santé des ressources marines[3].

Les propriétaires traditionnels sont visés et discriminés, alors que d’importants permis de pêche ont été concédés aux pêcheurs commerciaux intervenant à proximité des communautés aborigènes. Dans le cas des stocks de grande valeur comme l’ormeau, la majorité des prises des pêcheurs commerciaux sont exportées. L’histoire du peuple yuin est emblématique – depuis 1788, les peuples aborigènes des quatre coins de l’Australie sont dépossédés de terres qu’ils occupaient depuis 60 000 ans.

Mesures à prendre

  • Les autorités de la Nouvelle-Galles-du-Sud doivent adopter un amendement à la loi relative à la gestion de la pêche pour autoriser la pêche culturelle – tout en protégeant les stocks de poissons – et mettre un terme au harcèlement.
  • Elles doivent également aider les communautés aborigènes à accéder aux marchés commerciaux et à promouvoir une industrie des produits de la mer durable qui s’appuie sur le savoir culturel[4].

En savoir plus

Ils participent à Land Rights Now

Oxfam et New South Wales Aboriginal Fishing Rights Group

[1] https://www.pc.gov.au/inquiries/completed/fisheries-aquaculture#report

[2] Voir le résumé : https://www.claytonutz.com/knowledge/2013/november/native-title-rights-to-fish-mean-state-legislation-is-mere-abalone

[3] Total Allowable Catch Committee, 2015, Total Allowable Catch Committee Report and Determination for 2016 – Abalone Fishery.

[4] http://alc.org.au/newsroom/media-releases/commonwealth-delivers-on-aboriginal-fishing.aspx